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Diabolo Pêche ^^
4 décembre 2008

Jeudi sur le chemin de la clinique, à la radio

 Jeudi sur le chemin de la clinique, à la radio passait SOS d'un terrien en détresse. Superbe mise en condition! Arrivée, on m'a installée en salle de pré-travail, où j'ai passé l'après-midi à me morfondre, entrecoupée de crises de larmes. Heureusement mon mari est arrivé en début de soirée, juste pour dîner et nous nous sommes rapidement couchés, vu que le lendemain on devait me lever à 5h45 pour débuter le travail!

Donc le lendemain à l'heure prévue, debout, douche et hop une sage-femme m'introduit des cachets pour déclencher les contractions et dilater le col de l'utérus. Elle m'indique que dès que ça deviendra douloureux, on ira en salle de travail et qu'on me posera la péridurale, mais que si les contractions n'arrivent pas j'aurais droit encore à des cachets. Il est 6h30 et je sens que ça va être long! Mon obstétricien passe me faire un coucou. Les cachets font effet, je contracte, mais pas de douleur, juste un super mal de dos! Et histoire de me doper le moral, on me demande de signer le consentement pour effectuer un caryotype foetal. Génial.

Une autre sage-femme, Mathilde, m'emmène en salle de travail quand je lui parle de mon mal au dos "mais c'est de grosses contractions, c'est pour ça! " Il fait drôlement froid dans cette salle, mon mari frissonne, moi je grelotte et je claque carrément des dents! On me couvre de plusieurs couvertures, on me perfuse de glucose pour me donner des forces, on me refout des cachets et hop l'attente continue. Il est 9h30. Je n'arrête pas de caresser mon ventre, je ne sais pas si c'est pour tenter de rassurer mon bébé ou pour me rassurer moi. Surtout que la seconde fournée de cachets fait son effet, ça commence à devenir franchement douloureux.

Du coup on s'installe pour la péridurale, l'anesthésiste arrive de suite. D'ordinaire on entend dire que les anesthésistes sont pas sympa, ben là c'était tout le contraire. Il m'a fait coucher en chien de fusil, m'expliquait ce qu'il faisait, même si j'étais un peu prise par la douleur j'ai apprécié sa sollicitude. D'ailleurs c'est simple, j'ai été soulagée rapidement, le mal de dos a disparu et la douleur des contractions avec. En revanche, j'ai eu une superbe poussée de fièvre et je n'arrêtais pas de trembler, ce qui inquiétait autant mon mari que Mathilde.

Néanmoins j'avais d'autres soucis en tête, mon obstétricien a réapparu trop vite a mon goût. LE moment était venu. J'ai fichu égoïstement mon mari dehors, j'avais assez à me gérer moi pour le gérer lui en plus. On a installé un champ, pratiquement collé sur mon visage pour que je ne vois vraiment rien. J'ai passé tout le moment, les yeux étroitement fermés, à chantonner la berceuse de la maman de Dumbo, les poings crispés sur la bouche. Puis l'obstétricien m'a caressé la joue, c'était fini. Par un excellent timing mon mari est revenu pour m'assister dans mon effondrement complet. Heureusement la sage-femme qui me faisait les cours de préparation est passée nous voir, ça nous a changé les idées.

Sur le coup de 13h la poche des eaux a craqué, Mathilde était contente, elle disait que comme ça elle n'aurait pas à le faire, un geste intrusif pour moi en moins! Bon j'ai quand même eu droit à une autre fournée de cachets, à une prise de sang pour déterminer la cause de la fièvre et des tremblements et à un demi-verre d'eau avec des calmants pour la fièvre. Epuisée je m'assoupis sous l'oeil vigilant de mon mari. Le pauvre, je sais pas comment il tient (enfin si à coup de café et de cigarette, oui il s'est remis à fumer et je ne peux pas le blâmer ), le temps doit être encore plus long pour lui que pour moi, et en plus je me repose complètement sur lui, et en plus je lui dis qu'il pue la clope! Mariés pour le pire...

Vers 14h Mathilde me réveille pour un massage du col de l'utérus. Pas folichon j'aurais préféré un massage des épaules. Vers 15h, ça se précise, je sens comme une lourdeur dans le bas-ventre et je réclame une autre dose de péri en vue de la suite. Ah oui chochotte un jour, chochotte toujours! En tout cas, tout se précipite, plus ça va, plus la lourdeur devient gênante, j'ai envie de pousser et malgré la péri c'est limite douloureux! Du coup je me remets à émettre des sons (tu chantes??? dixit mon mari ), ça me rassure et ça m'aide. L'obstétricien réapparaît (je confirme que je veux pousser, et être éveillée pour l'expulsion ), on réinstalle un champ, on monte les barrières (des fois que je veuille me sauver ), on me met sur étriers en position gynécologique (oui j'ai  eu dit que cette position me plaisait pas, mais là ça allait, j'étais bien sur le dos et puis comme ça je pouvais broyer la main de mon mari à ma guise ).

L'obstétricien me lance un encourageant "allez dans un quart d'heure ce sera fini ", sage-femme Mathilde se transforme en coach sportif "agrippez les barrières, emmagasinez de l'air dans les poumons, bloquez et poussez fort!!! Allez c'est bien, on y va! Encore une fois! Allez vous allez le voir bientôt! " Du coup mon pauvre mari est un peu sur la touche, j'obéis bien sagement à mon coach sportif et je pousse comme si ma vie en dépendait. Mon obstétricien de son côté s'affaire, spatules (je les sens malgré la péri ), ventouse (j'entends le bruit de succion caractéristique ), encouragements (c'est bien, très bonne poussée, encore une comme ça! ). Et puis je sens que la tête passe, le corps suit dans une longue glissade, une dernière poussée pour le placenta et je peux me laisser aller. Je tourne la tête, il est 16h30. Mathilde sort rapidement avec notre bébé. Mais c'est pas fini, l'obstétricien se rappelle à mon bon souvenir! "euh je vous ai pas fait d'épisiotomie , mais vous avez une éraillure et deux petites déchirures, je vais vous faire quelques points pour que ça cicatrise bien " et là ouille!!! Ca fait mal, y a pas d'autre mot. Mon mari me tend sa main que je serre, pétris et malaxe tout en soufflant de tous mes poumons. Lui stoïque " apparemment les points c'est le pire! "

L'obstétricien me dit que je dois rester en observation encore deux heures, que nous pourrons en profiter pour faire connaissance avec notre petit bout. Puis il sort discrètement. Mathilde revient seule pour nous demander si nous voulons voir notre bébé de suite. Moi je veux, mon mari ne veut pas et il s'éclipse. Je comprends, c'est si difficile mais moi je n'aurais pas pu ne pas le voir. Je suis impatiente, je guette l'arrivée de Mathilde. Elle arrive bientôt avec dans les bras enveloppé dans sa couverture mon bébé, mon petit ange. Elle me le dépose dans les bras, ça y est je pleure, il est si léger! Une plume dans mes bras, une plume laissée par un ange. Elle nous laisse tous les deux, je découvre son petit visage, qu'il est beau! Des cheveux noirs qui rebiquent, des yeux fermés avec des cils déjà bien dessinés, un joli petit nez, une bouche bien charnue, des joues encore tièdes... Je le serre contre moi, je l'embrasse, je l'arrose de mes larmes. Millelarmes.Mille regrets me traversent, pourquoi je n'ai pas été capable de protéger ce petit bout comme je le devais? Ce moment d'intimité passe trop vite, Mathilde revient bientôt, elle a une surprise pour moi : une empreinte de son petit pied sur du joli papier dans une belle enveloppe. Elle prend quelques photos de nous sur ma demande. Elle me dit que pendant tout le séjour à la clinique je pourrais le voir autant que je voudrais, puis me le prend. Il me manque déjà. Mon mari revient, s'assoit, je lui parle un peu de notre bébé, il a les yeux rouges.

Les deux heures passent, on me monte dans une chambre. En passant dans les couloirs je vois un papa berçant un nourrisson, j'entends les pleurs des autres bébés. Mon coeur se serre, je manque pleurer j'arrive à garder une contenance. Mathilde m'installe et repart en me répétant que je peux descendre quand je veux. Mon mari va me faire installer la télé. A peine est-il parti que mon obstétricien arrive, me parle doucement des suites de couches et m'assure que je peux le joindre tout le temps, que je n'hésite pas. Il repart, mon mari revient, on nous installe le lit d'accompagnant et on nous porte les repas, c'est un va et vient cette chambre! Nous mangeons, mon mari s'écroule dans son lit, épuisé par une si longue journée difficile. J'envoie  des SMS, je regarde NCIS sans conviction, j'éteins la télé puis je pleure silencieusement dans le noir.

Le lendemain après le petit déjeuner mon mari rentre pour prendre une bonne douche et faire la déclaration à l'état civil. Moi à peine la toilette difficilement faite, je demande à la sage-femme si je peux descendre. Elle m'accompagne au bloc et me laisse à Mathilde qui m'emmène dans une salle au calme avant de me donner mon bébé. Je m'emplis les yeux de son petit visage, je lui caresse les cheveux, je lui murmure tout mon chagrin. Je m'arrache à contrecoeur à lui pour le rendre à Mathilde, lorsque je monte la sage-femme m'intercepte pour me dire que ma mère est dans la chambre! Alors que je lui avais bien dit que je ne voulais voir personne, je ne suis pas en état de recevoir des visites! La sage-femme me calme, et me dit qu'elle s'occupe de tout. Moi j'erre un peu dans un couloir, j'entends des mamans gazouillant avec leurs bébés, et moi je suis seule. Je réintègre ma chambre, le moral au plus bas, une crise de larmes m'emporte. Mon mari arrive, me demande pourquoi je vais voir notre fils si ça me mets dans des états pareils, je lui réponds que je peux pas m'en empêcher, lui résigné "bon si tu le dois, fais ce que tu as à faire ". L'après midi s'écoule, morose, mon escapade matinale n'a pas arrangé ni mes douleurs physiques ni mon moral. Mon mari a l'air aussi fourbu que moi, je suppose que la déclaration à l'état civil n'a pas été une partie de plaisir non plus. Du coup je le renvoie à la maison pour la nuit, je me dis qu'on se reposera peut-être plus chacun de son côté. Mon mari part, il sera là le lendemain à 8h tapantes croissant à la main. Quel amour!

Je passe quasiment une nuit blanche, être seule, ça favorise le ressassement entrecoupé de crises de larmes. Je ne suis pas la seule, à 8h mon mari m'appelle, la voix enrouée, il a cogité toute la nuit aussi et vient à peine de se réveiller. Du coup il arrivera plus tard bien sûr. Je le rassure, qu'il prenne son temps, ça me permettra d'aller voir notre bout de chou. On m'annonce que je sors dans la journée après la visite du médecin de garde, et les résultats d'une prise de sang matinale. Alors j'attends toutes ces visites pour pouvoir aller retrouver mon fils. Mon mari arrive croissant à la main comme promis, suivi par le médecin et la laborantine. Enfin je peux descendre, je vais aussi vite que je peux, si je pouvais voler! Mais je ne peux que trottiner.

Une autre sage-femme que Mathilde m'installe dans la salle de la veille. Conséquence de la nuit blanche ou la sortie imminente, je me mets à sangloter dès qu'elle me le pose dans les bras. La sage-femme nous serre dans ses bras, me dirige vers une chaise et sors sur la pointe des pieds. Moi je colle ma joue contre son petit front froid et je me laisse complètement aller. C'est pas compliqué j'alterne les baisers, les caresses, les mots tendes, les serrages sur le coeur avec les sanglots, les essuyages d'yeux et les mouchages de nez. Je ne sais pas combien de temps se passe, mais ma sage-femme compatissante revient en me murmurant "je sais bien que vous ne voulez pas me le rendre " Non en effet, je ne veux pas. Je veux rester là à le cajoler. Elle me serre les doigts, me dit que j'ai fait le bon choix, qu'il n'a pas souffert ; tout ça je le sais mais qui peux empêcher les regrets? Je lui rend à contrecoeur mon précieux poids plume. Elle me donne rendez-vous pour la mise en bière, mon sang se glace à ces mots, mais la réalité fait plus que me rattraper, elle me piétine.

Je remonte, je rassemble mes affaires. Je déjeune puis j'attends mes résultats. C'est pas très bon, les sages-femmes s'inquiètent et voudraient me garder plus, mais le médecin estime que je serais mieux chez moi et me libère. Nous rentrons donc, et c'est la deuxième séparation avec mon petit.

Je m'appelle Louis-David, je suis né et je suis remonté au ciel le 28 novembre à 16h28.

Maman et Papa pensent très fort à moi.

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